Déclaration conjointe de l’ACA, de la Society for American Archaeology (SAA), de l'Association canadienne d’anthropologie biologique (ACAB-CABA) et de l'Association canadienne pergélisol (ACP) au sujet du déni relatif aux pensionnats amérindiens

 Avertissement : ce texte évoque la mort d’enfants et les pensionnats amérindiens
 

Si vous souffrez d’un traumatisme ou vous êtes en détresse, de l’aide est disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 4 pour les survivants et leurs familles via la ligne d'écoute téléphonique de Résolution des questions de pensionnats indiens, au 1-866-925-4419. Des ressources en santé mentale pour les Autochtones d’à travers le Canada sont disponible via la Ligne d'écoute d'espoir pour le mieux-être, au 1-855-242-3310 ou par clavardage à l’adresse suivante : https://www.espoirpourlemieuxetre.ca/.

L’ACA, la SAA, L'ACAB-CABA, et l'ACP sont profondément préoccupées par les fréquentes occurrences de négationnisme au sujet des écoles résidentielles dans les médias de grande diffusion. À l’occasion du premier anniversaire de la déclaration de la Première Nation Tk'emlúps te Secwépemc au sujet de la découverte de tombes anonymes près de l’ancien pensionnat amérindien de Kamloops, en Colombie-Britannique, le National Post dans un de ses articles, a critiqué la couverture initiale de cette découverte et a mis en doute de nouvelles découvertes de potentielles tombes anonymes à proximité des pensionnats amérindiens, tandis qu’un article du New York Post les qualifiait de fake news. Le déni que renferment de telles informations revient à minimiser les impacts des pensionnats amérindiens et les situations tragiques qu’ont vécues les enfants qui y étaient placés. Il repose sur une logique biaisée, comme le montrent en détail Daniel Heath Justice et Sean Carleton ici et Kisha Supernant ici.

Depuis la déclaration de la Première Nation Tk'emlúps te Secwépemc, l’année dernière, les enquêteurs ont identifié des centaines d’autres tombes potentielles sur les anciens sites des pensionnats amérindiens. Les arguments négationnistes mettent en doute la légitimité de ces investigations. Le fait que des enfants soient morts ou aient disparu dans ces écoles est indiscutable, et cela est corroboré par les découvertes de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada (CVR) qui a compilé des témoignages directs de survivants, des sources d’archives exhaustives et des récits d’employés, entre de nombreux autres faisceaux d’indices.

La localisation des enfants disparus ou décédés dans les pensionnats amérindiens est souvent inconnue. Souvent, les familles n’étaient pas informées des décès et des disparitions, les registres n’étaient pas toujours tenus, les écrits existants ne sont pas toujours communiqués, et les marqueurs qui ont pu être placés sur les tombes ont disparu depuis longtemps. Pour les communautés qui veulent retrouver leurs enfants manquants, le radar à pénétration de sol (RPS) et d’autres moyens techniques géophysiques et de télédétection de surface peuvent contribuer à localiser des tombes potentielles en l’absence de claires indications des endroits où les enfants ont été enterrés.

Il est dérangeant de constater que certains des arguments négationnistes signalent que jusqu’ici, aucune des investigations au sujet des enfants manquants n’a localisé d’ossements humains, impliquant que de telles découvertes seraient la seule manière de « prouver » l’existence des tombes. Cela est profondément irrespectueux envers les communautés autochtones ayant vécu le traumatisme intergénérationnel infligé par ces écoles. Bien qu’il soit vrai que nous ne puissions jamais être certains à 100% de la cause d’une anomalie sans effectuer des fouilles, il est également vrai que la nature des anomalies individuelles, et les schémas de multiples anomalies similaires dans une région donnée, peuvent dans certains cas réduire presque totalement les incertitudes. Autrement dit, dans certains cas, le RPS peut prouver la présence de tombes au-delà de tout doute raisonnable, surtout quand on lui associe les preuves supplémentaires provenant des archives ou des témoignages oraux. Personne n’a le droit d’exiger que les communautés autochtones fouillent les tombes potentielles pour « prouver » le fait avéré que des enfants disparus sont morts dans les pensionnats amérindiens. Seules les communautés autochtones peuvent décider de la voie qu’elles peuvent prendre pour guérir.

Le déni au sujet des écoles résidentielles minimise la perte tragique d’enfants autochtones innocents. Il tente de dissimuler les horreurs qui se sont déroulées dans ces écoles et fait dévier la volonté grandissante dans les gouvernements et le grand public de redresser ces torts et leurs conséquences qui impactent encore les peuples autochtones du Canada de nos jours. Il nie la vérité et œuvre à l’encontre de la réconciliation.

L’ACA, la SAA, L'ACAB-CABA, et l'ACP interpellent les fausses représentations et les revendications biaisées des négationnistes et soutiennent fortement les droits des communautés autochtones de décider quand et comment elles se mettront à la recherche de leurs enfants disparus, et quand elles les commémoreront et se souviendront d’eux. Nous soutenons les demandes des leaders autochtones de pouvoir accéder à tous les registres existants des écoles résidentielles (http://nationnews.ca/community/indigenous-groups-push-catholic-church-to-release-residential-school-records/) et nous en appelons à tous les niveaux de gouvernements pour qu’ils continuent d’apporter leur appui aux communautés qui se lancent sur ce chemin difficile. L’ACA continuera de développer des ressources pour aider les communautés autochtones à prendre des décisions informées et à leur fournir du matériel de formation pour les aider à acquérir les capacités de mener leurs propres investigations.

Le bureau de direction de l’Association canadienne d’archéologie
La présidente de la SAA, Deborah Nichols
Le bureau de direction de l’ACP
Le Comité permanent sur les sépultures des pensionnats autochtone de l’ACAB-CABA