Natif de la rive sud de Montréal, Marcel s’est d’abord consacré à des études en biologie à l’Université de Montréal. C’est toutefois en travaillant sur les pêcheries de la Basse Côte-Nord qu’il s’est découvert un intérêt pour l’aspect humain de ce milieu. Cela l’a rapidement amené à délaisser la biologie pour s’intéresser à l’ethnologie de la pêche. Sa recherche aboutit alors à une publication décrivant les techniques de pêche depuis le début de la colonisation jusqu’au XXe siècle (La pêche sur le Saint-Laurent, répertoire des méthodes et des engins de captures, Boréal Express, 1979). Cette expérience auprès des pêcheurs l’amena à entreprendre des études supérieures au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal où il obtint son diplôme de maîtrise en 1967. C’est à Parcs Canada, d’abord à Montréal puis à Québec, que débuta sa carrière d’archéologue (1968-1980) où il occupa successivement les postes de chercheur sur le terrain et d’analyste en culture matérielle. À Québec, il assumera en outre la direction de la Division de la région de Québec et au cours de cette même période, il mettra au point une série de guides pour l’identification de la culture matérielle. Ces derniers contribueront rapidement à favoriser les échanges et la communication des résultats au sein de la communauté archéologique francophone. Révisés et réédités à plusieurs reprises par la suite, ces guides ont établi les standards dans ce domaine. Parallèlement à ses activités professionnelles, Marcel Moussette complétait ses études doctorales à l’Université Laval. Sa recherche portait sur les Forges du Saint-Maurice et il s’intéressait plus précisément à l’histoire du chauffage domestique au Canada. Déposé en 1980, elle sera publiée trois années plus tard (Le chauffage domestique au Canada, Presses de l’Université Laval, 1983). La profonde connaissance qu’avait Marcel de la culture matérielle constituera sa marque de commerce et il n’est pas exagéré d’affirmer aujourd’hui qu’il est l’un des plus grands spécialistes de la culture matérielle de la période française en Amérique du Nord. Au fil de ses recherches, il a développé une approche contextuelle qui a guidé ses réflexions sur la signification complexe de l’objet. Ainsi, il est allé bien au-delà des classifications traditionnelles des objets, en allant jusqu’à présenter des analyses complexes sur les modes de création et de déposition des assemblages. Deux articles phares ont d’ailleurs été produits sur cette question (« L’objet archéologique, un réceptacle et générateur de sens », in Paléo-Québec, no 23, 3-15, 1995; « Sens et contresens: l’étude de la culture matérielle au Québec », in Canadian Folklore Canadien, 4 (1-2): 9-25, 1984). On lui doit en outre deux ouvrages de références incontournables issus de deux de ses projets de recherches sur la culture matérielle du Régime français à Québec. Le premier considérait les assemblages provenant du site de l’Habitation de Champlain (Le site de l’habitation de Champlain à Québec, Ministère des Affaires Culturelles, Dossier 58, 1985, en collaboration avec Françoise Niellon) et le second présentait l’analyse des terres cuites grossières provenant des sites des maisons Estèbe et Boisseau de la Place Royale (Les terres cuites communes des maisons Estèbe et Boisseau, Collection Patrimoine, Ministère de la Culture et des Communications, Dossier 51, 1996). Ces ouvrages sont fondamentaux pour quiconque s’intéresse au Régime français en Amérique du nord. D’autre part, peu après avoir joint la Faculté des lettres de l’Université Laval, Marcel a mis sur pied une école de fouilles archéologiques sur le site de l’îlot des Palais à Québec. Ce chantier-école, qu’il a dirigé de main de maître de 1982 à 1993, a été à l’origine de nombreux mémoires de maîtrise et de doctorat. L’approche pédagogique mise de l’avant a permis que ce stage devienne rapidement un terrain fertile pour la formation des étudiants, tous cycles confondus. De ces recherches, le Professeur Moussette a tiré une monographie intitulée Le site du palais de l’intendant à Québec, genèse et structuration d’un lieu urbain (Septentrion, 1994). Il y explore la relation entre les divers changements structurels révélés par les fouilles qui ont couvert plus de trois siècles d’occupation de ce lieu important d’où émanaient les décisions effectives pour toute la Nouvelle France. Cette publication constitue un parfait exemple de l’utilisation de l’archéologie contextuelle dans l’étude des univers multiples d’un site archéologique. En cela, l’ouvrage s’impose comme un précurseur en archéologie urbaine. Durant sa carrière à l’Université Laval, Marcel a été nommé directeur du CELAT, un centre de recherche interuniversitaire constitué d’une trentaine de chercheurs provenant de cinq universités et œuvrant dans des domaines aussi divers que la littérature, l’histoire de l’art, la sociologie, la sémiotique, l’histoire, l’anthropologie et, naturellement, l’archéologie. Sa bibliographie comprend à ce jour 11 livres et 67 articles et il ne montre aucun signe de ralentissement. Il a publié sur des sujets aussi divers que le paysage, les médailles religieuses, les fusils de traite, les couteaux, les perles et la céramique, son domaine de prédilection. Il a également siégé à titre de directeur d'une collection de monographies sur l’archéologie dans laquelle il a supervisé la publication de 27 volumes. Il a également publié deux romans qui présentent des personnages vivants dans l’environnement urbain de Québec et un autre roman sortira ce printemps. Son travail de terrain ne s’est pas limité aux chantiers-écoles de l’université. Ainsi, entre 1987 et 1998, Marcel a dirigé un projet de recherche sur une exploitation agricole du début du Régime français située à l’île aux Oies, dans l’estuaire du fleuve Saint-Laurent. Ce programme de recherche a enrichi considérablement nos perceptions du monde rural canadien du XVIIe siècle en documentant les modes de subsistance des premiers colons vivant en milieu insulaire et leur utilisation des terres humides. Ce projet a démontré tout le potentiel de recherche que recèlent les seigneuries et les fermes qui ont souvent été négligées par les archéologues du Québec. Les résultats de cette recherche ont été publiés en 2009, aux Éditions GID sous le titre Prendre la mesure des ombres: archéologie du site du Rocher de la Chapelle, l’île aux Oies, Québec. Marcel a porté plusieurs chapeaux au cours de sa carrière. Par
exemple, il a été membre de la Commission des biens culturels du Québec de 1983 à 1986. À ce titre, il a joué un rôle déterminant dans la direction de la protection et le développement des ressources patrimoniales de la province. De 1985 à 2002, il était également coordonnateur de l’Entente pour la recherche archéologique entre la Ville de Québec et l’Université Laval. Il a assumé des responsabilités similaires pour une autre entente de financement et de recherche entre la Ville de La Prairie et l’Université Laval sur une période de quatre ans. Ces projets ont favorisé la formation de centaines d’étudiants de premier cycle et de dizaines d’étudiants diplômés en archéologie historique. En 1997, il a été reçu membre de La Société des Dix, une société intellectuelle multidisciplinaire fondée en 1935. Son essai inaugural portant le titre « Un héros sans visage: Champlain et l’archéologie » (Cahiers des Dix, 2000 (54):13-44) abordait la question épineuse de la fascination d’un peuple pour la découverte du tombeau de Samuel de Champlain, fondateur de la Nouvelle-France. Ce chercheur respecté de tous a été et continue d’être membre de nombreux comités rattachés à l’archéologie, le patrimoine, la gouvernance et les acquisitions muséologiques. De telles fonctions révèlent que l’on apprécie chez lui son jugement et ses contributions à l’élaboration de politiques en matière de patrimoine, et ce, au-delà des limites de l’archéologie qu’il pratique. Reconnu pour le rôle-clé qu’il a joué dans le développement de l’archéologie historique au Canada, Marcel Moussette a été honoré par plusieurs organismes qui lui ont décerné leur prix le plus prestigieux. En 1984, il a reçu la médaille Luc-Lacourcière pour son livre Le chauffage domestique au Canada et en 1996, il a été reconnu par le Conseil international des Monuments et Sites (ICOMOS Canada) pour ses contributions à la recherche et à la promotion du patrimoine culturel du Québec. De plus, la Society for Historical Archaeology lui a accordé le Prix du mérite en 2000 tandis que l’Association des archéologues du Québec a reconnu ses contributions à l’archéologie en 2001. C’est en 2005 que la Society for Historical Archaeology lui a décerné sa reconnaissance la plus prestigieuse en lui attribuant la médaille J.C. Harrington pour une carrière exceptionnelle en archéologie historique. La même année, il a été reconnu comme spécialiste de la semaine par Radio-Canada pour ses contributions à l’histoire et à l’archéologie de la ville de Québec. En 2009, Marcel a de nouveau été reconnu au Québec et a reçu le prix Gérard-Morisset du Gouvernement du Québec pour son œuvre, dont ses études en culture matérielle et sa contribution à la formation d’une génération d’archéologues québécois. Enfin, en 2010, la Faculté des lettres de l’Université Laval a organisé une soirée de remise de prix en l’honneur de Marcel. Il s’agissait d’une reconnaissance hautement méritée pour avoir supervisé 39 étudiants à la maîtrise et cinq doctorants au cours de sa carrière à titre de professeur-chercheur.